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Ce que vous devez savoir sur l’article 606 du Code civil

27 septembre 2025

L’entretien des gros murs, des voûtes, des digues et des toitures ne relève pas systématiquement du propriétaire. La jurisprudence a multiplié les distinctions entre réparations d’entretien et grosses réparations, créant des obligations inattendues pour l’usufruitier. La frontière entre travaux d’usage courant et interventions structurelles demeure source de contentieux, malgré la lettre du Code civil.

À quoi correspond l’article 606 du Code civil ?

L’article 606 du code civil s’invite inlassablement dans les débats entre propriétaires, usufruitiers et locataires, dès qu’un bâtiment montre des signes de fatigue ou accuse son âge. Héritée du XIXe siècle, sa formulation distingue les opérations qui garantissent la solidité du bien de celles qui relèvent d’une maintenance régulière. Ce texte dresse la frontière des fameuses grosses réparations : interventions réservées à la structure, murs porteurs, voûtes, charpentes, toitures, tout ce qui fait tenir droit un immeuble et conditionne sa pérennité.

Dans la version d’origine, il est question « des gros murs et des voûtes, le rétablissement des poutres et des couvertures entières ». Cette énumération, loin d’être exhaustive, ouvre la porte à une mosaïque d’interprétations. Les juridictions, confrontées à la diversité des situations, ont parfois élargi la définition à d’autres éléments indissociables du bâti, selon la disposition des lieux ou les nouvelles techniques de construction.

Dès qu’il est question de bail commercial ou de démembrement, la question de la répartition des charges se crispe autour de l’article 606. Chaque camp, usufruitier, propriétaire ou locataire, s’y réfère pour défendre sa position, tenté soit d’échapper à une dépense, soit de limiter son engagement. La nuance dans la qualification des travaux, au moment de la rédaction des accords, peut tout changer. Mais à l’arrivée, ce sont le texte et son interprétation qui emportent la décision en cas de litige.

L’article 606 trace des lignes, mais laisse encore bien des zones grises. Chaque situation a ses particularités, ses subtilités. Les professionnels du droit s’appuient donc sur des décisions de justice et des analyses de spécialistes pour démêler les dossiers, sachant que le verdict du juge donne souvent le mot de la fin.

Les grosses réparations : une liste précise et des enjeux majeurs

Les grosses réparations bénéficient d’une définition légalement cadrée, mais ce sont les exemples qui en dessinent les contours les plus concrets. Voici les principaux travaux généralement considérés comme telles :

  • Ravalement de façade : cette opération franchit la limite des grosses réparations uniquement si la stabilité du bâtiment s’en trouve menacée.
  • Digues et murs de soutènement : inclus dès lors qu’ils participent à la stabilité de l’ensemble immobilier.
  • Réfection totale de la toiture : toujours classée dans la catégorie des réparations majeures, par opposition à une simple intervention locale qui reste du domaine de l’entretien ordinaire.

Ce découpage n’a rien de superficiel : il détermine qui doit régler la note des travaux. Pour un bail commercial, les obligations sont vite source de tensions. Impossible, sans clause cristalline, de faire peser ces coûts sur les épaules du locataire. Les juges retoquent systématiquement toute clause floue ou déséquilibrée pour protéger l’équité contractuelle.

Quand les contrats manquent de clarté, les conflits éclatent. Illustration concrète : la toiture d’un immeuble menace de s’effondrer, mais le bail ne précise rien sur ce point. Le flou alimente des discussions âpres où chaque virgule du code civil entre en jeu, au risque de bloquer le chantier.

Bailleur ou locataire : qui paie quoi selon la loi et la jurisprudence ?

Dans l’univers du bail commercial, la question de la prise en charge des travaux donne matière à une multitude de désaccords. En principe, l’article 606 du code civil désigne le propriétaire comme seul responsable des grosses réparations touchant à la structure du local. De son côté, le locataire reste cantonné à l’entretien régulier et aux réparations locatives courantes.

Cependant, il existe parfois la tentation chez certains bailleurs d’imposer au locataire des obligations supplémentaires par l’intermédiaire du contrat de location. Mais l’arbitrage des tribunaux est clair : un texte ambigu ou abusif ne permet pas au propriétaire d’échapper à ses responsabilités majeures, telles que la rénovation intégrale de la toiture ou des fondations. La règle de l’obligation de délivrance oblige le bailleur à fournir au preneur un espace apte à l’activité professionnelle déclarée.

Pour plus de clarté, voici un tableau illustrant comment la loi et la jurisprudence répartissent classiquement les charges :

Réparations Bailleur Locataire
Grosse réparation (toiture, murs porteurs) Oui Non
Entretien courant Non Oui
Réparations locatives Non Oui

Le quotidien du bail commercial se décide donc dans le contenu précis du contrat. Les clauses doivent être examinées à la loupe afin de détecter d’éventuels transferts de charges contraires à la réglementation. En l’absence de précision, le code civil reprend ses droits, et le propriétaire reste garant de la structure du bâtiment.

Façade d

L’impact de la loi Pinel et les points de vigilance pour sécuriser votre bail commercial

Depuis 2014, la loi Pinel a modifié en profondeur la gestion des baux commerciaux. Un texte réglementaire restreint désormais clairement la possibilité de faire supporter au locataire tout ou partie des charges afférentes à l’article 606 du code civil. Les gros travaux qui concernent la structure, le toit, les murs ou même un ravalement intégral restent donc en dehors du champ des charges transférables au locataire, même par le biais d’une clause formelle.

Chaque bail commercial doit comporter un inventaire détaillé des charges et réparations, pour chaque partie. Cet état des lieux, actualisé au moins tous les trois ans, mentionne précisément la répartition des obligations. Ce dispositif garantit au locataire une vision claire de ses engagements. Le bailleur, lui, ne peut plus s’affranchir des dépenses liées à la structure de l’édifice.

Avant de signer, certaines vérifications dans le contrat permettent de limiter les mauvaises surprises :

  • Établir une liste complète et détaillée des charges qui peuvent être récupérées sur le locataire
  • Indiquer sans équivoque que les grosses réparations décrites à l’article 606 ne pourront en aucun cas être imputées au locataire
  • Insérer la mention d’un inventaire triennal actualisé pour les travaux à partager
  • N’oublier aucune mention liée aux travaux imposés par les autorités, pour éviter toute contestation ultérieure

Les litiges se multiplient quand les contrats sont rédigés dans la précipitation. Demander l’avis d’un avocat en droit immobilier reste le meilleur moyen d’éviter un contentieux coûteux : l’œil expert repère rapidement les oublis et s’assure de la cohérence de la répartition des charges, tout en tenant compte des dernières évolutions réglementaires.

Le code civil fixe les grandes lignes, mais l’écriture du contrat et une veille rigoureuse assurent la tranquillité des parties. Au moment clé de la signature, chacun connaît son rôle et peut avancer sans craindre de mauvaises surprises.

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